
La Sagesse des CampagnesÉpisode 1 Chapitre 1
Synopsis
Visitez Altenor à travers les yeux d’une jeune fille découvrant la cité pour la première fois.
Auteur IRL
Cedric Neumann & Laureline Brun
Chapitre 1
Aujourd’hui était un jour particulier. Pour la première fois, j’allais me rendre en Altenor. Depuis toujours nous fantasmions de cette cité. Après les amourettes, c’était clairement le second sujet le plus populaire des adolescents de mon village. Aller faire moudre nos grains au Mur des Vents était une aventure, mais pousser à l’est jusqu’à la capitale était…, que dire, je ne trouvais pas les mots ! Et moi, je n’avais fait ni l’un, ni l’autre. Mes proches m’exhortaient à leur raconter tout ce que j’aurai vu là-bas à peine rentrée. Je n’étais pas parti qu’ils étaient impatients.
Ils m’assaillaient aussi d’avertissements et de recommandations. Ici, on racontait que toutes sortes de créatures vivaient dans cette gigantesque ville et que nombre d’entre elles étaient des guerriers ou de puissants aventuriers, maitrisant la magie et les atoriums. Certains de mes amis étaient effrayés.
Pour ma part, j’étais excitée à l’idée de partir vers cette contrée, si souvent contée, et pourtant inconnue. J’avais à la fois peur et envie de voir des alacars et des sticis. Dans nos collines, je n’avais jamais eu l’occasion d’en côtoyer de près. Notre bourgade se focalisait sur le travail de la terre. Nous n’avions que quelques cohors aux carapaces ternes pour varier des humains. Ils étaient certes gentils mais bourrus et peu causants, tous semblables au vieux voisin coléoptère. Pour ce qui est des alacars, nous n’en voyions qu’au loin. Certains nous survolaient parfois. Je n’en avais vu aucun s’arrêter dans notre trou.
Alors que je donnais l’accolade à mes amis et à mon frère, mon père me fit signe de de le rejoindre. Je me hâtais de m’installer dans la carriole.
J’eus droit à un clin d’œil avant qu’il ne parle :
« Prête à découvrir les merveilles de la cité d’Altenor ? » Son air malicieux aurait dû m’interpeller…
J’hésitais un instant puis mon cœur choisit de se réjouir. Je hochais vigoureusement la tête, un large sourire plaqué sur les lèvres. J’avais la chance incroyable d’avoir un père paysan et marchand, dont les champs et les affaires tournaient plutôt bien. Il lui arrivait une fois l’an de se rendre à la capitale pour négocier au nom de la communauté. Entre les journées de voyages et les semaines sur place, il était absent longtemps. Nos champs ne produisaient que du millet, du blé et de l’orge mais ces céréales étaient importantes pour nourrir les foules de la cité.
Mon père me disait d’être fière de l’accompagner, mais je ne savais pas trop quoi penser. Il avait décidé de m’emmener, avec lui, ce jour-là, pour me faire découvrir la ville et m’initier au commerce de là-bas. Je pense qu’il voulait initialement que mon frère ainé l’aide. Mais malheureusement pour lui, ce n’était pas gagné. Ce benêt de frangin ne pensait qu’à courir les bois, à chasser les loups-phacochères et les filles du village ! Accessoirement, il cherchait aussi à me mettre la tête dans le purin dès qu’il le pouvait. Mon père avait donc reporté tous ses projets sur moi. A 14 ans, j’avais la chance d’être formée mais j’avais peur. Je doutais. Etais-je à la hauteur de ses attentes? … Aujourd’hui en tous cas, l’entrain m’emportait.
Au bout de 2 heures, mon excitation était complètement remplacée par le mal de dos et les bleus de mon arrière-train. Il faut dire que mon postérieur était très chahuté ! Les nids de poules et la rusticité de notre carriole ne m’épargnaient aucun choc. C’est là que voler comme un alacar, ou marcher comme certains cohors eut été utile… Quand je ne rêvais pas à une improbable transformation, je comptais les cailloux qui défilaient lentement, très lentement. De temps à autres, je remplaçais mon père à la conduite du chariot pendant qu’il se reposait ou je dormais à l’arrière.
Les jours défilèrent.
Un matin, il me réveilla. L’aube pointait à peine et colorait le ciel de chaudes teintes.
« Il faut que tu voies cela » dit-il en me levant la tête. Je restai coite. Au milieu des îles volantes, des moulins et des chaînes du Mur des Vents, le ciel était divisé en deux par une tour immense qui se perdait dans les nuages rosés.
« C’est la Tour » dit-il simplement en m’observant sans cacher son amusement.
Je devais avoir l’air d’une poule. Une poule qui vient de pondre le plus GROS œuf jamais pondu. Mon ignorance me gênait mais l’excitation m’envahit à nouveau.
« C’est l’Atorium d’Altenor » précisa-t-il. Les moulins, les îles, tout m’attirait ! mais il nous fallut passer sans nous arrêter… et subir à nouveau sept jours de tape-fesses ! Outre la frustration de traverser le mystérieux Mur des Vents sans pouvoir ne serait-ce que toucher une chaîne, cette fin de trajet fut aussi remplie de nombreuses explications et mises en garde paternelles : quoi faire, que dire, faire attention… j’étais à bout. Il ne parlait pas souvent mais quand il parlait, il m’ennuyait quel que soit le sujet et je n’écoutais pas.